À l’Institut médico-éducatif la Pépinière, une dizaine d’adolescents, insoumis, francs et spontanés se prêtent au jeu de la mise en scène et du cinéma. Terrain d’expérimentations musicales, poétiques, amoureuses et philosophiques, le centre prend alors un caractère d’exutoire.
Sur la commune de Loos (Nord), située dans la zone périurbaine de Lille, est installé l’Institut médico-éducatif “La Pépinière”, qui reçoit des adolescents atteints de handicap mental. Ce lieu clos, grand domaine arboré à l’ambiance bucolique, a immédiatement fasciné les deux réalisatrices, venues là sur la recommendation d’artistes en résidence.
Dans ce centre hors norme, sans contacts avec le monde extérieur mais qui prépare ses pensionnaires à se “réinsérer” dans ce monde, une poignée d’adolescents s’épanouissent à travers des activités de plein air, manuelles et surtout artistiques, puisque la musique tient une grande place dans leur quotidien. Ombline Ley et Caroline Capelle, toutes deux issues des Ars déco de Paris en section photo/vidéo, ont choisi la méthode de l’immersion pour approcher ces jeunes au comportement souvent fantasque. Acteurs-nés, ils improvisent constamment. Ils ont aussi très activement participé par leurs idées et leurs histoires, généreusement partagées, à la construction d’un scénario qui s’appuie largement sur l’imaginaire et le rêve, et tout autant sur le vécu et les problèmes exitentiels : l’avenir, l’amour et, bien sûr, le handicap.
Comme le relève Léa, qui se voit chanteuse dans la vraie vie : «Après La Pépinière, il y a soit l’ESAT [service d’aide par le travail ouvert aux personnes handicapées], soit… c’est tout.» Ses camarades ne sont pas moins conscients des difficultés et des déceptions à venir, mais en attendant, leur corps exulte : Ophélie bat le rythme de la Marseillaise en se brossant les dents, Valentin écrit soigneusement sa lettre d’amour, Médéric se lâche aux commandes de son fauteuil turbo, Alexis cumule les déguisements de Superman et de Batman pour mieux “sauver les gens”. Quant à Gaël, peut-être le plus étrange de tous, ses crises se manifestent par des cabrioles dignes d’un gymnaste de haut niveau, desquelles il ressort sans une égratignure.