Dans les années soixante, Alger est devenue la capitale du Sud insurgé, “l’équivalent de La Havane pour l’Afrique” (Olivier Hadouchi). En juillet 1969, le président algérien Houari Boumediene inaugure le premier Festival culturel panafricain : “Notre continent aux trois-quarts libéré, mais en pleine possession de son destin, entreprend […] de réussir le plus grand rassemblement des arts et des lettres de l’histoire, qui soit à l’échelle d’un continent et à la mesure de la totalité de ses expressions”.
William Klein filme l’événement avec de nombreux collaborateurs, Antoine Bonfanti, Yann Le Masson ou Sarah Maldoror. Au-delà du manifeste pop-révolutionnaire, le cinéaste exalte dans un festival étourdissant de couleurs et de mouvements, la vitalité des corps et des cultures. Dans la rue libre et ouverte à tous les regards, William Klein saisit avec un plaisir contagieux, le fracas joyeux des indépendances africaines.
Le cinéaste déploie aussi toute son écriture visuelle au service d’une dénonciation systématique des fondements idéologiques de la colonisation européenne en Afrique. L’iconographie raciste de la propagande coloniale est manipulée à son tour pour dénoncer ou caricaturer jusqu’à l’outrance la mission “civilisatrice” des occidentaux.
Film présenté dans sa version longue et restaurée.
Film projeté en 35 mm.
Programme
Séance présentée par Olivier Hadouchi (programmateur et historien du cinéma), Augusta Conchiglia (photographe et journaliste), Ahmed Bedjaoui (directeur artistique du Festival du film engagé d’Alger et professeur à l’Université Alger 3).
Historien du cinéma et programmateur de films, Olivier Hadouchi a soutenu sa thèse en 2012 sur le cinéma dans les luttes de décolonisation (Le cinéma dans les luttes de libération : genèses, initiatives pratiques et inventions formelles autour de la Tricontinentale (1966-1975). En écho à l’exposition consacrée à Zineb Sedira à la Galerie du jeu Paume, Olivier Hadouchi a notamment conçu la programmation intitulée Échos & souffles des résistances algériennes.
Augusta Conchiglia est une journaliste et photographe italienne, envoyée par la RAI pour filmer la guerre de libération de l’Angola en 1968. Festival panafricain d’Alger réemploie de nombreuses images prises et tournées par la reporter en Angola.
Ahmed Bedjaoui est une figure du cinéma algérien. Animateur du Télé ciné club, producteur et présentateur d’émissions sur le cinéma à la télévision algérienne, programmateur et responsable des archives à la Cinémathèque algérienne, conseiller auprès de l’Office du cinéma algérien (ONCIC) qui a produit Festival panafricain d’Alger, directeur de production cinématographique à la Radiodiffusion-télévision algérienne, ce diplômé de l’IDHEC (maintenant La Fémis) est aussi journaliste et enseignant. En 1969, Ahmed Bedjaoui participe à l’organisation du Premier festival culturel panafricain au côté de Mahieddine Moussaoui (fondateur de la Cinémathèque algérienne) et du Ministre de l’information Mohamed Seddik Benyahia. La commande d’un film sur le festival est alors finalement attribuée à William Klein.